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Le blog de MVDC
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6 janvier 2008

Louis XIV

Allez prenez une feuille, interrogation écrite !
J’espère que jeudi soir à 21h tapante, vous étiez devant France 2?

Cette fois, je n’ai pas été trop déçue...

 

                               louisxivjeunearmuresmall (Portrait exécuté par Charles Le Brun en 1665)

 

Les costumes étaient somptueux, Louis XIV bel homme et la voix Off une berceuse agréable. J’ai même appris des choses… Tenez par exemple, vous saviez vous que le célèbre compositeur Lulli est mort de son art ? Au moment d’offrir un Te Deum à son bon Roi, il lève sa canne de chef d’orchestre, la rabaisse pour battre la mesure et pof ; la laisse violemment retomber sur son pied. Gangrène. Dead. C’est vraiment bête comme mort, mais quand on sait qu’à l’époque, une dent pourrie pouvait vous conduire au cimetière on se dit que Louis XIV est un miraculé. Enfin, il a tout de même donné, entre ulcères, rages de dents, fièvres et fistules (et là, quand on voit débarquer le Chirurgien de La Mort armé de sa faucille, on se dit : « Quelle chance d’être au XXIe s »). Mais je ne vais pas vous refaire le film…

 

Parce qu’il y a toujours des vérités historiques contestables. Prenez l’exemple du dernier Marie-Antoinette, Sofia Coppola n'a pas été épargnée… A-t-elle été plus intéressée par la bande-son que par le fond historique ? Je dois tout de même avouer que j’avais passé un moment agréable devant ce film. Il a beau être creux —mais branché, est-à-dire que tous les branchés sont creux ??? — la fraîcheur des couleurs et des personnages m’ont séduite. On peut avoir bien des griefs, ce cru Coppola&daughter offre tout de même une interprétation modernisée du film historique. Un bon dépoussiérage, de temps en temps, ça ne fait jamais de mal. 

 

Pour revenir à notre épisode Versaillais, je suis restée un peu sur ma fin, difficile aussi de résumer le règne le plus long de l’histoire de France en 1h30. Je ne veux pas prendre la défense de la romance, mais France 2 nous a habitué à des trilogies, alors j’attends la suite, ou le début... Pourquoi un seul volet ? Petit problème de budget ou simple choix stratégique ? Bref, là n’est pas la question. La question étant: le costume !

Sachez tout d’abord que le règne de Louis XIV se décompose en 3 phases assez distinctes : la jeunesse, la matûrité, le déclin. 3 phases, 3 maitresses : La la Vallière, la Montespan, La Maitenon (ça c’est notre feuilleton qui simplifie, pour donner des axes, parce qu’en télé, comme en commentaire composé, on aime les axes de lecture.. Pourtant, je conteste : et la Duchesse de Fontanges, qu'en ont-ils fait ? (Elle légua pourtant gracieusement son nom à une coiffure, en participant à une chasse royale : ayant perdu au cours d'une chevauchée royale les rubans qui retenaient sa coiffure, la jeune duchesse s'était recoiffée avec sa jarretière. Le roi, conquis, complimenta son sens du raffinement, et la coiffure devint très vite à la mode.)

 

Plus sérieusement, les livres d’histoire découpent ces 3 phases de façon plus politique : Une période de Régence  durant laquelle le jeune roi, fils d’Anne d’Autriche, est placé sous la tutelle de Mazarin et subit La Fronde (1643-1661) ; une longue période d’apogée, quand le Roi Soleil devient Maître absolu (1661-1700) et la fin de règne, triste et nécrologique (1700-1715). 50 années de règne qui influenceront profondément l’histoire du costume.
Images de ces vicissitudes…

 

             T067948A (Le beau Louis)

 

             T637551A (La Reine Marie-Thérèse, qui lui donna 6 enfants)

 

Notre feuilleton commence en 1662, date charnière de l’excommunication de Fouquet et du début des grands travaux de Versailles. Il occulte donc les années de minorité du Roi pour se concentrer sur la période flamboyante du règne. Mais pour une meilleure compréhension, reprenons au début. Quand, à 18 ans, la stature de Louis XIV ne faisait pas encore preuve d’autorité.

 

Vêtu d’un pourpoint de velours uni (vêtement ajusté et rembourré en usage dès le XIIe siècle, qui couvrait le cou jusqu’à la ceinture), sans broderies ni rubans, le jeune roi veut enrayer cette chasse à l’or que les galants de la Fronde avaient institué (mais qu’il remettra en vigueur quand il sera Soleil). Il réussit. Le pourpoint est raccourci, le haut-de-chausses (culotte courte) laisse passer, tout à l‘entour de la ceinture, un flot de linge. Les manches fendues cessent bientôt de lui plaire, on commence par les raccourcir au bénéfice de la chemise, puis on les ferme définitivement. Modifications inutiles : les jours du pourpoint sont comptés : il comporte trop d’ornements futiles. L’habit militaire le remplace définitivement vers 1670 et fournit à l’habit civil ses deux pièces capitales, la veste et le justaucorps.

 

A cette date, Louis XIV entend bien tenir sous sa coupe la noblesse. L’Etiquette est son carcan. Versailles achève de la dompter. Eblouir pour la tenir. En l’emprisonnant dans cette cage dorée, il la contrôle à tous les niveaux et devient l’arbitre de la mode. Une mode qui ne se décide plus à Paris mais à Versailles, et qui ne doit être que  « Plaisir des yeux et chatoiement des couleurs ». Vêtements négligés et de deuil sont interdits à la cour. Quiconque désire plaire à sa Majesté doit lui ressembler. « Et Versailles de donner le ton à l’Europe entière. Mais ce qui fait la difficulté de dessiner nettement le costume de ce temps, c’est d’abord ce fait que l’ornement l’emporte sur le principal ; c’est ensuite que l’initiative individuelle est de plus en plus prisée. Une personne hardie qui se montrait avec quelque nouveauté bizarre était aussitôt imitée par tout un petit cercle, comme s’il n’y eût pas eu d’autre moyen de tenir son rang que de changer quotidiennement de tenue… »

 

 

 

Louis_XIV_1715_20(A droite, Louis XIV)

 

L’habit classique des belles années de Louis XIV est ajusté jusqu’à la taille, tombant en une jupe arrêtée aux genoux, manches larges qui s’évasent sur l’avant-bras en un parement très orné. A cette époque, le terme d’habit change d’application, il sert à désigner le justaucorps (plus tard sous le nom anglais de redingote). Justaucorps et veste deviennent deux tuniques ajustées, sans ceinture, qui se boutonnent l’une sur l’autre, et se taillent dans les riches draps colorés des fabriques françaises restaurées par Colbert. La veste hérite en partie des décorations de dentelles, de rubans, de broderies du pourpoint (à noter, l’extrême prodigalité de rubans sur tous les vêtements et accessoires. Sans être un fin observateur, vous n’avez pu passer à côté dans le film).

 

Pour se préserver des intempéries, on porte des manteaux demi-longs à manches et boutonnés qu’on appelle "brandebourgs", du nom de leur garniture qui tire elle-même son nom de son origine allemande.

 

Pour se donner de la prestance, on portait la perruque. Le roi n’aimait pas le grand feutre que son père avait si bien porté, il se décide pourtant à la porter dès 1673, mais sans poudre. Elle lui chatouille le nez. C’est seulement après 1700 que la farine devient à la mode. Les chapeaux sont bas de forme et à bords plutôt étroits (développement encore bien suffisant pour qu’on y enroule de grandes plumes). A la fin du règne on retrousse ces bords sur 3 côtés et la plume ne tarde pas à être supprimée.

 

Falbalas, jusqu’aux petit collet qui encadre la tête. On s’en tient d’abord au collet rabattu ; puis on attache ce collet avec une cravate de dentelle. Les rabats dégoulinent ensuite sur la poitrine en larges flots. Enfin le rabat cède la place à la cravate, dès l’adoption du justaucorps et de la veste. Un flot de dentelles postiches, s’attache au cou par un ruban, devenu pièce importante. En 1693, sous le nom de c"haconne" apparait un ruban, qui distinct de la cravate, vient flotter sur l’habit déboutonné ou sur le jabot. Jabot, c’est ainsi qu’on baptise l’ouverture de la chemise sur l’estomac. Il passe d’usage quand on se boutonne et que la chemise se montre à la ceinture en gros bouillons.

 

          P1000613(La promenade de Louis XIV dans la Vue du bassin d'Apollon et du Grand Canal de Versailles, Denis Martin Pierre, 1713.)

 

Les chausses n'auront bientôt plus la cotte. Au milieu du règne, on suit de préférence une mode étrangère, d’importation hollandaise, celle des "rhingraves" (une ample culotte tombant tout droit dont la doublure se noue aux genoux). Cette mode dure jusque vers 1680, la véritable culotte va prendre le dessus. Il s’ensuit que les bas deviennent un élément primordial dans un costume recherché, il est d’usage de les assortir à la couleur de l’habit. Les premiers bas de coton, qui remplacent les bas de soie venus de Milan, puis d’Angleterre, datent des dernières années du XVIIe ; on les attache par une jarretière au-dessus du genou. Les canons avaient justement pour but de rejoindre ces deux pièces l’une à l’autre, chausses et bas. De vrais manchettes adaptées aux jambes, des flots de rubans et de dentelle retombant sur les bottes. Pareils fanfreluches disparaissent lorsqu’on adopte la tenue plus martiale de 1670. L’adoption de la culotte leur porte un coup fatal, car avec les bas apparents et longs, ils n’ont plus de raison d’être.

 

Quant à la botte, elle est à la noce sous Louis XIV.  Une botte composée de cuir et de dentelles, à bouts carrés, épanouie à mi-jambe, peu pratique pour marcher. Et concurrencée par ces fins souliers à talonnette, garnis de nœuds sur le cou-de-pied. C’est seulement à la fin du règne qu’on revient aux bottes militaires, fortes et pesantes.

 

       louisxiv  (N'est-il pas élégant notre Roi Soleil en costume "d'empereur" avec ses petits bas de soie et sa pointe de ballerine... Notez le talon rouge. C'est lui qui mit cette mode en vigueur, pour se démarquer de ses sujets. Bientôt, tous les nobles auront les talons rouges)         

 

 

 

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Commentaires
E
Super intéressant ce blog!<br /> Je suis super jalouse que tu aies accès à des archives de fringues mythiques.<br /> je mets un lien sur le mien;<br /> http:/archiduchesse.canalblog.com
F
Très intéressant, dis donc.
M
Je n'étais pas devant France 2 donc un grand merci pour ton texte. J'étais sûre que tu nous parlerais des talons rouges que notre bon roi imposa à la cour. Un brin fétichiste, comme j'aime.
P
Je suis d'accord, il faut synthétiser pour démocratiser. A quand Lulu, tes merveilleux cours d'histoire de l'art sur un blog ? je serai ta lectrice la plus assidue, tant de choses encore à connaître, so exciting !
L
Moi j'ai bien aimé son côté synthétique. Il faut parfois être synthétique en histoire de l'art et en histoire tout court si on veut se faire comprendre...(ça sent le vécu non?). C'est marrant parce qu'on peut faire les mêmes constats pour le mobilier qui a suivi un chemin parallèle à celui de la mode (et oui faut bien que je me la pète un peu sinon à quoi ça sert toutes ces lectures??) Ton texte est encore une fois captivant, on se laisse prendre au jeu et à tes envolées! Bravo <br /> gros mis
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